À toute chose malheur est bon !

par / Mark Breslin

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Au moment où j’écris ces lignes, notre pays et notre secteur sont en proie à une crise de taille. Si les mots « terrain inconnu » sont surutilisés, ils n’en expriment pas moins l’incertitude que suscitent les  changements profonds et les défis énormes auxquels nous faisons face ces temps-ci.  Cependant, toute tribulation a son utilité — et je suis certain que vous pouvez même le constater dans votre vie personnelle. Après réflexion mûre ou stratégique, tout problème, sujet de préoccupation, revers ou défi important peut devenir l’occasion de prendre du recul et de faire mieux à l’avenir.

Depuis mon enfance, j’ai été témoin de bien des bouleversements dans notre industrie. Mon père, passé de charpentier syndiqué à entrepreneur, avait 150 ouvriers sur le terrain, un El Camino et une résidence d’été à Twain Harte, et mes sœurs et moi ne manquions de rien. Puis, il y a eu la crise économique de 1975-1976. Les taux d’intérêt ont grimpé à 16 %. Personne ne nous payait plus. Les marges de crédit n’existaient pas. L’univers économique de notre famille s’est écroulé très rapidement, entraînant dans sa chute l’entreprise de mon père. Nous avons traversé une période difficile, mais nous en sommes tous sortis plus forts, plus avisés et plus prospères que jamais.

Durant la récession des années 80, je me cherchais un emploi. Aucun de mes amis n’arrivait à en trouver. La promesse d’un bel avenir après des études supérieures me semblait une blague monumentale. J’ai alors eu un entretien d’embauche chez United Contractors, qui avait reçu 110 CV et choisi sept finalistes. La faim engendre le désir de réussir. On a perçu ce désir chez moi et l’on m’a embauché. Comme je suis maintenant directeur général, je dirais que les choses ont plutôt bien marché.

Durant plusieurs autres périodes de ralentissement, j’ai vu notre industrie se débattre, et les capacités qu’on avait dû développer à cause d’épreuves antérieures se sont manifestées clairement pendant la crise financière de 2008. Aussi étonnant que cela puisse paraître, peu d’entrepreneurs de ma connaissance ont fait faillite comparativement à ce que j’avais observé dans des circonstances moins pénibles. Pourquoi ? Parce que les leçons que des crises précédentes leur avaient enseignées les ont aidés à voir plus clairement ce qu’ils devaient faire. Et forts d’une sagesse, d’une perspicacité et d’un dynamisme accrus, ils ont de nouveau prospéré.

Maintenant, nous sommes encore une fois aux prises avec une crise et avec l’incertitude qu’elle laisse dans son sillage. Il est essentiel pour les dirigeants de ne pas se borner à parer au plus pressé ; il faut plutôt qu’ils se souviennent que c’est le moment de faire preuve d’empathie, de compréhension et de discernement. Le succès en affaires dépend du souci qu’on a des personnes qui font partie de notre entreprise et, afin qu’elles puissent résister aux épreuves du moment, elles doivent voir et sentir qu’on se préoccupe vraiment d’elles. Ceux pour qui ce souci pour autrui sera prioritaire vont non seulement développer de nouvelles capacités et compétences, mais ils vont aussi obtenir un avantage concurrentiel une fois que ces difficultés seront choses du passé.

On dit que les symboles chinois pour les notions de désordre et d’opportunité sont les mêmes. Je vais devoir le croire sur parole. Cela est un peu ironique mais peut avoir quelque utilité pour nous. Le problème actuel va peut-être se régler plus tôt que tard, mais une récession paraît inévitable. Notre industrie pourrait connaître une période de repli — ou, inversement, l’étape suivante du redressement pourrait consister à injecter d’énormes sommes dans l’infrastructure. Voici ce que je sais : pour être en affaires dans notre milieu, il faut avoir les capacités et compétences de faire face aux adversités. Quiconque accepte le degré de risque inhérent à notre secteur est en mesure de réagir stratégiquement à de profonds changements.

À titre de leaders, nous sommes chargés de guider dans la tempête ceux qui dépendent de nous et nous avons ici une excellente occasion de développer de nouvelles capacités. Je dis à mon personnel que notre manière de réagir en ce moment est une occasion à saisir. Voir mon père vendre son El Camino m’a fait réfléchir aux limites du contrôle que nous avons dans la vie. Toutefois, nous pouvons tous maîtriser la façon dont nous réagissons. Je nous invite tous à saisir cette épreuve à bras-le-corps et à en faire une occasion d’améliorer nos compétences et nos capacités non seulement pour nous-mêmes, mais pour tous ceux que nous dirigeons et dont nous nous préoccupons. ▪